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Librairie Alexis Noqué

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Pierre Louÿs

Autograph letter signed, Louÿs

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LOUŸS, Pierre (1870–1925), Autograph Letter Signed “PL”, Velléda, Tuesday evening, 19 September. 8 pp. 8vo on two bifolia.

A remarkable and expansive letter, rich in theatrical gossip, artistic intrigue and wit, in which Louÿs recounts his encounter with Gabriel Astruc, the impresario behind the Saisons russes, the future Théâtre des Champs-Élysées, and the great names of the Ballets russes, including Ida Rubinstein, Pavlova, Nijinsky and Karsavina.

Louÿs describes Astruc’s visit to Arcachon and the proposal that he write a mimodrama for Ida Rubinstein, followed by a second commission for the opening spectacle of the new opera house in 1912, built around the Symphonie fantastique. The financial terms were, as Louÿs notes with amused astonishment, “enormous compared to the simple thirty-page libretto” requested.

A highlight of the letter is Louÿs’s comic depiction of Astruc’s total ignorance of music, discovered when the impresario instinctively recoiled from the orchestral score of Berlioz. Louÿs seized the moment and proceeded to read aloud all 226 pages, measure by measure, knowing Astruc would be unable to object.

The narrative continues with a telegram announcing Bakst’s enthusiastic approval, as well as colourful details about Rubinstein’s absence in Rhodesia, where she was “hunting lions before decapitating Holofernes” in Louÿs’s Judith scenario.

"J'ai reçu ici dimanche la visite d'un juif considérable, Gabriel Astruc, l'organisateur de toutes les saisons Russes de Paris (Rubinstein, Pawlova, Nijinski, Karsavina, etc.) et le constructeur du nouvel Opéra des Champs-Elysées. Il ressemble à M. Auban-Moët. Il ne ressemble pas à Paul Déroulède.
Il est financier depuis le sommet de sa calvitie et jusqu'à son dernier poil de barbe. Et il me disait : 
"Nous en avons assez. Toute la France est d'accord pour désirer la guerre. Nous l'acceptons, mais qu'on la fasse ! Nous aimons mieux la guerre une fois, que ces craintes perpétuelles de conflit."
Astruc (que je ne connaissais pas) m'avait demandé vers le 1er août si je voulais écrire une pièce pour Ida Rubinstein - ou plutôt un mimodrame, un scénario de pièce musicale sans paroles. Je lui ai répondu oui, sans vouloir rien écrire sur mon sujet. Deux semaines plus tard il est venu exprès de Paris à Arcachon pour m'interroger.
Je lui ai offert deux sujets à choisir, dont le second m'intéressait plus que le premier.
1° Judith
2° Un drame (sans paroles) dont la musique de scène serait la symphonie fantastique de Berlioz.
J'ai parlé pendant trois heures. Il a accepté chacun des deux sujets au milieu de mon exposé sans attendre que j'aie fini. Puis il m'a dit : (de sa voix juivre)
"Maître, je suis comme une mère, qui espérait un enfant et qui en trouve deux dans le petit berceau." (sic, sic, sic)
Après quoi, comme il aimait mieux, lui aussi, visiblement, le second sujet que le premier, il a pris le premier pour Rubinstein et le second pour lui. C'est à dire que le second (la Fantastique) formera, dit-il, le spectacle d'ouverture de son opéra des Champs Elysées qui ouvre en octobre 1912.
Tout cela est confidentiel et entre nous deux. Il m'a demandé le secret jusqu'à la signature.
Quand il m'a dit : "Quelles conditions ?" je l'ai laissé parler. Et après deux ou trois répliques nous avons conclu sur les chiffres - espacés... échelonnés mais dont je trouve le total énorme comparé au simple livret de trente pages qu'on me demande pour chaque spectacle.
Scène qui me fait rire, deux jours plus tard : 
Au moment où j'ai ouvert devant lui la partition d'orchestre de la Fantastique, j'ai surpris un mouvement instinctif de recul et je me suis dit immédiatement : 
"Toi, je te tiens. Tu es directeur d'opéra et tu ne sais pas un mot de musique."
Alors, je lui ai ouvert la partition sous le nez, j'ai rapproché ma chaise et je lui ai lu, sans pitié, les 226 pages, mesure par mesure avec tous les commentaires littéraires que je pouvais imaginer, sachant qu'il ne pourrait jamais me faire une objection, qu'il serait intimidé jusqu'à la fin, et qu'il finirait par m'être reconnaissant de ne pas lui avoir dit une fois : 
"Comment comprenez-vous ce dialogue entre l'alto et le troisième cor ?"
(la phrase à ne pas dire).
-
Mercredi 3h
Je reçois à l'instant cette dépêche : 
"Bakst enthousiaste. Je télégraphe chez les lions. Compliments."
Astruc

Bakst est l'artiste qui fait à la fois les décors, les costumes et la mise en scène des ballets russes. Il est intelligent et très consciencieux. Il avait dit à Astruc : "Je voudrais pourtant bien savoir quel sujet choisit M. Louys, parce qu'il me faudra trois mois d'études avant mon premier dessin".
Le 1er tableau se passe chez Judith (Judée) le second dans le camp d'Holopherne (Assyrie). C'est cela qui lui plaît.
Quant au télégramme d'A chez les lions, il signifie qu'après avoir appris que j'acceptais en principe, Ida Rubinstein a quitté l'Europe le 10 aout sans avoir la moindre idée du sujet que je ne voulais pas dire. Elle passe l'été (ou plutôt l'hiver austral) en Rhodesia, au delà du dernier chemin de fer. Elle chasse le lion avant de décapiter Holopherne, et c'est là, dans le canton où mourrut Livingstone qu'elle va recevoir la dépêche d'Astruc lui disant : "Vous serez Judith".
Je t'embrasse
PL".

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